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L'Islande au bord du gouffre, titre le monde..

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Message  elfeeolh45 Mer 6 Oct - 20:12

L'Islande au bord du gouffre, titre le monde..

Un pays en faillite potentielle mendiant à l'étranger un financement à court terme, deux des trois grandes banques nationalisées en catastrophe, une inflation de 15 % et une monnaie, la couronne islandaise, qui, en un an, a perdu 60 % de sa valeur : telle est la situation actuelle de l'Islande. Comment a-t-on pu en arriver là ? C'est la question que se pose l'Islandais moyen en ayant le sentiment de n'avoir participé en rien à cette piteuse équipée.

Cette crise qui terrasse l'Islande n'est pas franchement visible. Les grandes artères de Reykjavik sont embouteillées des mêmes somptueux 4×4 matin et soir. La forêt de grues est toujours là, surplombant des chantiers en panne. Là ou devaient se construire un palais de la musique, un "World Trade Center", un hôtel de luxe de 400 chambres et le nouveau siège de la banque Landsbanki - en cessation de paiement et nationalisée depuis mardi 7 octobre au matin -, seule la salle de concert verra le jour. Mais Reykjavik reste à la fois calme et industrieuse avec ses ciels de pluie fulgurants et son chômage inexistant.

Oui, comment en est-on arrivé là ? L'Islande n'est pas un pays en voie de développement, c'est une société très moderne de 330 000 habitants, la plus riche des nations nordiques après la Norvège, qui caracole en tête de tous les palmarès internationaux. C'est un Etat de droit dont les institutions sont analogues à celles des pays scandinaves. Et pourtant, on en est arrivé là.

Il y a d'abord un problème intérieur qui n'est pas nouveau : les Islandais, depuis plusieurs générations, vivent à crédit, au-dessus de leurs moyens. Plusieurs générations l'ont fait depuis la guerre, c'est leur culture, et ils ont toujours payé leurs dettes au prix d'un deuxième, voire d'un troisième boulot. On a ici le sentiment de vivre quand on a de l'argent, c'est-à-dire quand on n'en a plus le temps. Mais ce n'est pas cela qui a ruiné l'Islande, même si les banques, caressant les Islandais dans le sens du poil, leur proposaient encore récemment de payer leur logement sur quarante ans sans apport personnel. Les jeunes couples qui ont été tentés le paient aujourd'hui chèrement : leur dette dépasse la valeur de leur bien immobilier. Les générations précédentes s'en sortent un peu mieux. Leurs retraites seront amputées, le premier ministre, Geir Haarde, l'a annoncé sans ambages lundi, car les fonds de pension possèdent un important portefeuille d'actions dans les banques en déroute.

Mais, si le problème n'était qu'intérieur, la petite société islandaise aurait tôt fait de s'en remettre, tant les cycles de récession et d'expansion se mettent rapidement en marche dans une société aussi réduite. Le problème est, en fait, la taille démesurée des banques islandaises par rapport au pays et l'imprévoyance et les erreurs de la banque d'émission islandaise. Le premier ministre a révélé que les dettes des banques représentaient douze fois le PNB de l'Islande. Il était temps que les Islandais, surpris, l'apprennent.

La troisième banque du pays, Glitnir, fut la première à ne pas pouvoir se refinancer. La nouvelle de sa nationalisation a ébranlé la confiance dans les filiales de la seconde banque, Landsbanki. Ses clients ont récupéré leurs avoirs en Grande-Bretagne dans un mouvement de panique, mettant la banque Landsbanki à genoux. En cessation de paiement, elle a été placée sous le contrôle des autorités financières. Et qui, pendant la crise, a donné l'impression de ne pas mesurer la situation ? Qui, depuis des années, a évité de signaler l'excessif endettement des banques ? Le directeur de la banque d'émission, M. David Oddsson, ancien premier ministre et président du parti conservateur et qui continue en sous-main de tirer les ficelles de son parti, oubliant parfois qu'il n'est plus premier ministre.

Les banques islandaises sont récentes et leur histoire est une saga édifiante. Jadis toutes les banques d'Etat, très nombreuses dans un aussi petit pays, ont fusionné. Il n'en est plus resté que trois, privatisées dans les années 1990. Le schéma est jusqu'ici classique. Mais à qui confier le noyau dur de ces banques ? Cruel dilemme et conflit d'intérêt : les riches repreneurs se sont avérés être des entrepreneurs qui, une fois devenus banquiers, se sont accordé des crédits avec une coupable libéralité.

Les deux banques, aujourd'hui nationalisées, ont des profils qui se ressemblent. Notons, pour les freudiens, que les entrepreneurs islandais sont soit des frères, soit une association père-fils.

L'homme d'affaires Björgólfur Gudmundsson, qui vient de perdre des dizaines de milliards de couronnes en trois jours, avait tenté d'ouvrir à la concurrence le transport de fret maritime en Islande. Acculé à la faillite, il émigra en Angleterre. Alcoolique repenti mais confiant dans l'avenir de la consommation d'alcool en Russie, il y créa une brasserie et introduisit à Saint-Pétersbourg la consommation des mélanges "breezers" vodka-soda. Bien gérée, l'entreprise prospéra et fut revendue à Heineken. "Gudmundsson Monte-Cristo", de retour en Islande, avait les moyens d'acquérir la Landsbanki avec l'argent russe. Mais le père et le fils se lancèrent dans la pharmacie et le téléphone en Europe de l'Est, puis dans une grande variété d'investissements pas toujours heureux en Grande-Bretagne. Le père, tel un oligarque russe, s'offrit un club de foot de première division britannique, West Ham, un rêve de gosse.

Johannes et Jón Ásgeir Jóhannesson, qui possédaient 31 % de la banque Glitnir, la première à être nationalisée, c'est aussi l'histoire d'un père et de son fils. Le père, épicier, lança une chaîne de supérettes "discount". Le fils a épousé l'héritière de la plus grande chaîne de supermarchés. Là aussi, une grande ambition glissa lentement vers la démesure. Au Danemark, leur société, après avoir investi massivement dans l'immobilier, lança un quotidien gratuit aujourd'hui disparu.

Leur situation financière en Grande-Bretagne là encore n'est guère plus brillante : seuls les petits pois congelés Iceland font des bénéfices. Toutes les enseignes prestigieuses achetées au prix fort dans la mode, la joaillerie ou les jouets ne sont plus vendables. Bien qu'appauvri le fils vole toujours en jet privé entre l'Islande et New York où il réside.

Mardi matin, la banque d'émission a doté la couronne d'un taux fixe (130 couronnes pour un euro), et les Russes ont promis un prêt de 4 milliards d'euros. Ce retour des Russes fait sourire ceux qui se souviennent de la guerre froide. Les Américains avaient alors une base de 4 000 soldats qu'ils ont désertée depuis pour des destinations plus chaudes, l'Islande étant un maillon essentiel de repérage des sous-marins soviétiques. Les Russes, à l'époque, courtisaient les Islandais, et troquaient du pétrole contre des vêtements de laine et du hareng. L'Islande a perdu de son importance géopolitique, mais pourrait redevenir intéressante si la fonte des glaces polaires devait transformer le nord des côtes de la Sibérie en autoroute maritime.
Gérard Lemarquis
Article paru dans l'édition du 09.10.08
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